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Escotilla Tango à la Maison de l’Argentine

On raconte que lorsque Astor Piazzolla a pu, en 1954, enfin réaliser son rêve grâce à une bourse pour aller étudier à Paris l'art du quatuor à cordes avec Nadia Boulanger, cette dernière, à l’issue de la première année, a critiqué le manque de personnalité de ses compositions. Piazzolla lui a alors révélé qu'il écrivait des tangos. Après avoir entendu une de ses compositions elle lui a déclaré que c’était là sa véritable vocation.

Il semblerait que les quatre musiciens d’Escotilla Tango, qui nous ont offert ce concert le 21 avril à la Maison de l’Argentine, épousent peu ou prou la destinée du maître. Ils ont évolué dans des univers musicaux distincts, mais malgré leurs diverses formations classiques, ils partagent le même engouement pour le tango. Arthur Simonini, violoniste depuis l’age de 5 ans et licencié en physique, a d’abord reçu une formation classique au conservatoire de son quartier avant de se mettre à l’écriture et l’orchestration au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. En marge de son parcours classique il s’intéresse aussi à l’informatique musicale, a abordé le jazz et, en autodidacte, le piano et la batterie. Alvise Sinivia, pianiste et compositeur issu d’une famille d’artistes, est actuellement en troisième année au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris avec un intérêt particulier à la musique de chambre. Pierre Cussac, chambriste lui aussi, licenciée en musicologie, est accordéoniste et bandonéoniste. Il interprète un vaste répertoire, allant de la transcription d’œuvres baroques à la création contemporaine, sans oublier les musiques traditionnelles et improvisées. Leïla Renault, aussi compositrice et arrangeuse, a commencé la contrebasse à l'âge de 18 ans, après le piano. En parallèle avec des études scientifiques, elle a obtenu son Diplôme d'Etudes Musicales de contrebasse classique en 2008.

C’est ainsi qu’en revisitant les tangos du début du siècle et les contemporains, ce groupe à l’interprétation rigoureuse et respectueux des traditions, choisit et retranscrit des oeuvres originales pour se les approprier et en perpétuer l’âme. Ils cherchent à reproduire les sonorités originelles mais intègrent également, grâce à leur expérience, des couleurs nouvelles et inattendues.

Escotilla Tango à la Maison de l’Argentine

Nous avons commencé avec “A Don Augustin Bardi” d’Horacio Salgan, où le bandonéon tenait la vedette sur un rythme très rapide, comme dans le dernier morceau qui était du même compositeur. Ensuite est venu un morceau d’Annibal Troilo, un “monstre sacré” suivi d’Hotel Victoria de Juan d’Arienzo avec un dialogue violon-bandonéon très rythmé.

Le morceau le plus intéressant, et le plus investi, était, comme de juste : Buenos Aires Hora Cero, d’Astor Piazzolla, avec pour commencer des gratouillements sur les cordes du piano transformé en guitare et en tambour avec des coup de poing sur le bois. Le bandonéon était étiré à son maximum, le violon pincé et la contrebasse transformée en métronome. Après cette introduction d’improvisation de musique contemporaine, nous sommes revenus à une interprétation plus classique, un peu exaspérée.

La transition s’est faite avec Tres y Dos, deuxième morceau d’Anibal Troilo, tantôt très piqué, tantôt très lourd – le tango des extrêmes, suivi de Don Goyo de Luis Berntein, un compositeur réputé pour ses morceaux dansants. Le morceau suivant : La loba y el dromedario, au titre énigmatique, de Gerardo Jerez Le Cam, était une mélodie traînante puis hachée, en alternance.

Puis de nouveau Anibal Troilo avec “Pa' que bailen los muchachos” qui rappelle le temps où l’Argentine comptait une femme pour trois hommes et où ces derniers dansaient ensemble. Avec des moments de bandonéon solo. Dans le morceau suivant “Agua e Vinho” d’Egberto Gismonti, c’est le violon qui attaquait en solo avec lenteur et gravité. Enfin avec A Evaristo Carriego (en hommage au poète) d’Eduardo Rovira on a retrouvé quelques petites touches d’improvisation de style contemporain.

Frédéric Sausse

Escotilla Tango à la Maison de l’Argentine

Programme distribué :

A Don Augustin Bardi – Horacio Salgan
Toda mi vida – Anibal Troilo
Hotel Victoria – Juan d’Arienzo
Buenos Aires Hora Cero – Astor Piazzolla
Tres y Dos – Anibal Troilo
Don Goyo – Luis Berntein
La loba y el dromedario – Gerardo J. Le Cam
Pa' que bailen los muchachos – Anibal Troilo
Sus Ojos se cerraron – Alfredo Le Pera
Agua e Vinho – Egberto Gismonti
Brava daga – Gerardo Jerez Le Cam
A Evaristo Carriego – Eduardo Rovira
A fuego lento – Horacio Salgan

Tag(s) : #Article de presse
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